LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE 2

LE SANCTUAIRE D'ETTY MACAIRE 2

« Ancien Feu » : Nathalie Amani N’guessan-Gballou rallume l’ancien feu

La quatrième  de couverture nous expose le visage de l’auteur. Une jeune et belle dame au sourire charmant. Elle s’appelle Nathalie Amani N’guessan-Gballou. Le lectorat ivoirien la connait très peu. Pourtant « Ancien Feu », ce roman-ci est déjà sa troisième œuvre.

Scan roman ancien feu.jpg

La première de couverture de ce roman est belle voire sexy. La couleur est un savant mélange de rose et de rouge. Couleurs de l’amour et de la passion selon la tradition et la symbolique des couleurs. Dans un encadré un couple, deux tourtereaux probablement. La main dans la main, allant vers un horizon inconnu mais certainement prometteur. Il est aisé de formuler comme hypothèse de lecture qu’il s’agit d’une histoire d’amour. Le roman appartiendrait donc au registre du sentimentalisme que raffolent de nombreux lecteurs Ivoiriens.

 Le titre « Ancien Feu » nous renvoie au français populaire ivoirien. Il faut être de cette culture pour ne pas se perdre dans son décodage. Il dénote le souvenir d’un amour passé. Un amour du passé qui peut renaître comme le sphinx de ses cendres. Car le véritable amour défie le temps et l’espace. Des difficultés peuvent le compromettre, l’enchaîner, le terrasser, mais ne peuvent l’éteindre. C’est en quelque sorte la trame de ce petit roman long de 130 pages.

En scène, sur ce territoire où l’amour est roi, un jeune homme Robert et une jeune dame Natacha. Ils se sont aimés par le passé. Mais des vents contraires avaient  hypothéqué leur rêve. Ils pensaient leur amour englouti par le dictat de la distance et du temps. Ils pensaient que rien ne pouvaient le ressusciter. Quand ils se sont vus dans le cadre de leur service, après une demi-dizaine d’années, ils n’avaient pas imaginé que le destin allait leur jouer un de ces tours ! Le poète ivoirien Azo Vauguy parlerait du « rire du destin ». Il est bien connu : la logique de l’amour échappe à la raison. La jeune fille vit avec un homme, Thomas,  dans un foyer apparemment stable. Le jeune homme, lui, prétend être en instance de divorce avec son épouse avec qui il a des enfants. Le service les rapproche. Les voyages les rapprochent davantage. La proximité et l’habitude finissent par faire vibrer les cœurs. Chacun éprouve cette soif tyrannique de l’autre. Mais il faut se libérer du présent pour se réconcilier avec le passé. Malgré les incompréhensions, les suspicions, les hésitations, le feu de l’amour sous la cendre continue de vivre et de battre comme leur cœur.

Nathalie Amani, avec réalisme, nous relate une de ces petites histoires d’amour qui peuplent la vie des hommes et des femmes. Dans les villes et villages, dans les bureaux et les services se nouent et se dénouent des destins. Personne ne peut deviner quelle orientation peut prendre une vie sous l’influence d’un cœur humain. Personne ne peut savoir quand est-ce l’amour peut naître ou renaître. Le roman « Ancien Feu » nous rappelle que si la graine d’amour trouve une bonne terre, ni le temps ni l’espace, ni les oppositions, ni les épreuves ne peuvent la trucider. Car l’amour est fort et se moque des goulots d’étranglement. Robert et Natacha pris dans le tourment de leur cœur n’ont pas le choix que de se libérer de tous les engagements et autres scrupules qui contrebalancent leur amour. En s’avouant l’un à l’autre leur flamme, ils se libèrent et se donnent des chances à connaître le bonheur. Car, malgré les contingences existentielles, l’amour est le socle du mariage.

Le roman de Nathalie Amani est d’une lecture aisée. L’autrice n’est pas de ceux qui entourent de leur intrigue de termes sacrés pour initiés. Le vocabulaire se laisse décoder, la syntaxe est des plus ordinaires. L’intrigue, elle, ne sort pas des sentiers battus. L’histoire de ce roman plaira certainement au commun des lecteurs. Mais il faut le dire clairement : elle est loin d’arracher le lecteur en quête de frissons apaisants de la grisaille quotidienne, ce que Baudelaire nomme les « miasmes morbides ». Et c’est là que pèche notre autrice. Le style ne réunit pas les conditions de la littéralité. L’écriture trop docile voire prosaïque procure difficilement le plaisir esthétique. Du point de vue de la forme, le roman manque de folie et de fantaisie. De la paralittérature en somme.

 

Macaire Etty

Ancien Feu (Nathalie Amani N’guessan-Gballou), Frat Mat éditions, 2014 

In Fraternité Matin du 12 Juillet 2014



12/07/2014
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 31 autres membres